Les maths font leur cinéma, part. 1

 

Les aventures d'un mathématicien de Thorstein Klein (2021)

L'histoire peu connue du mathématicien juif originaire de Pologne, Stanislas Ulam. Son rôle, pourtant, fut crucial lors du Projet Manhattan qui vit la naissance de la bombe atomique américaine. On lui doit aussi, cela peut sembler anecdotique, la spirale qui porte son nom :

Spirale d'Ulam

Une représentation originale de la distribution des nombres premiers. De cela le film ne parle pas, mais il s'attarde sur son amitié avec von Neumann et sa collaboration houleuse avec Edward Teller sur la fabrication de la bombe H. Le film est agréablement lent, les acteurs inconnus et la place laissée au silence, à l'image du Nevada désertique font de ce film européen une adorable surprise sur un sujet si difficile à montrer : les mathématiques.

Mary de Marc Webb (2017)

Au centre mathématique de ce film, il y a l'un des sept problèmes de l'institut Clay : Les équations de Navier-Stokes. Qui prouvera l'existence théorique de solutions à de telles équations gagnera un million de dollars. L'histoire se concentre sur Mary, une enfant surdouée qui vit avec son oncle depuis la mort de sa mère, brillante mathématicienne qui travaillait précisément à la résolution de ce problème. L'oncle, joué par Chris Evans, essaye de la préserver de son héritage et des affres qui accompagnent le génie. Difficile pour Mary de se fondre dans une classe de CP quand on sait lire et compter comme une lycéenne. On peut deviner entre les lignes du scénario le même désarroi du jeune Gauss, un génie lui aussi.

Le film est touchant, ficelé comme un produit américain, avec des beaux paysages marins, une histoire d'amour, une méchante grand-mère, mais humaine quand même et riche, et le personnage de Mary joué avec justesse par Mckenna Grace.

Les figures de l'ombre de Theodore Melfi (2017)

Les femmes sont les grandes absentes des mathématiques. Elles sont peu nombreuses et l'histoire les oublie souvent, à l'instar de Théano, la femme de Pythagore, elle aussi mathématicienne. Dans ce long-métrage, l'accent est mis sur le rôles des afro-américaine dans la conquête spatiale. Souvenons-nous des masses de calculs qui nécessite tout problème balistique. Or, sans ordinateur, les résultats doivent être obtenus à la main. Derrière le destin des trois personnages historiques, il y le travail des femmes dans l'effort de guerre, à tel point qu'il existe une unité pour mesurer les calculs : le kilogirl, qui équivaut à environ mille heures de calcul.

Un film convenu et convenable, plaisant. Un bon point de départ pour une cinémathèque mathématique.

L'homme qui défiait l'infini de Matt Brown (2015)

Ce film, hélas, n'est pas sorti en salle en France, seulement en VOD et DVD. Il s'agit de l'adaptation du roman éponyme de Robert Kanigel. Il s'agit d'un biopic sur la génial mathématicien indien Ramanujan, sa venue en Angleterre, sa rencontre et son amitié avec Hardy, ses difficultés à s'adapter à la vie britannique et aux exigences de la mathématique occidentale, jusqu'à sa mort précoce à l'âge de 32 ans.

Les problématiques mathématiques sont bien rendues, le travail de Ramanujan sur la formule de partition d'un entier notamment. Il est à déplorer qu'à l'écran, les acteurs choisis, Dev Patel et Jeremy Irons, accusent une différence d'âge d'une quarantaine d'année, donnant à voir une relation de mentor à disciple, alors qu'une dizaine d'années séparaient les personnages réels. Hardy ne s'est jamais retenu d'exprimer toute l'admiratio qu'il avait pour son jeune ami et ses regrets de n'avoir pas su et pas l'aider.

Imitation game de Morten Tyldum (2015)

Quand on parle d'espionnage et de services secrets, on est assuré d'avoir la bonne formule pour un scénario haletant. Mais quand en plus, il s'agit d'Alan Turing, mathématicien brillant à l'origine de l'informatique théorique et du concept moderne de l'ordinateur, on peut y aller tranquille. On apprendra quelque chose.

L'histoire, aujourd'hui publique, raconte comment l'armée anglaise met sur pied une équipe de "têtes chercheuses" afin de casser la machine à coder des Allemands, Enigma. On parle de cryptanalyse dans le jargon du chiffre, mais cela le film ne le dit pas. Comment Turing a construit une mécanique monstrueuse de roues et de chaînes, comment la solution est venue d'une banale erreur humaine, comment Turing dut affronter la justice à cause de son homosexualité et fut condamné à la camisole chimique.

Ce point manque de subtilité historique, à cette même époque de la guerre froide, les services secrets anglais venaient de démanteler le plus grand réseau d'espionnage à la solde des soviétiques, le fameux club des "Cinq de Cambridge". Des profils bien trop semblables à celui de Turing, même université, même orientation... pour qu'Alan ne soit pas suspect et condamné.

Pour autant, le scénario est riche et l'interprétation de Benedict Cumberbatch époustouflante.

À suivre...

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